La planification successorale : l’égalité et l’équité ne sont pas toujours synonymes
La distribution de votre patrimoine à parts égales entre vos proches peut sembler le moyen le plus simple de satisfaire tout le monde, mais ce qui est équitable pour un membre de la famille pourrait ne pas l’être pour un autre.
Récompensez-vous l’enfant qui s’est occupé de vous pendant les dernières années de votre vie et qui est entièrement autonome, ou aidez-vous l’enfant qui pourrait vraiment bénéficier de votre héritage? Avant d’entamer la planification de votre succession, Michelle Munro, directrice en chef, Recherche sur la retraite et la fiscalité chez Fidelity Investments Canada, vous propose quelques suggestions pour faire en sorte que vos décisions finales soient prises dans un esprit d’équité.
Soyez honnête avec vos bénéficiaires quant à leur héritage.
En ce qui concerne la planification successorale, vous ne pouvez pas supposer que vos bénéficiaires seront d’accord avec vos décisions. La meilleure façon d’éviter les conflits futurs, voire même de longues batailles juridiques, est de maintenir une communication honnête avec vos proches au sujet de vos dernières volontés.
Mme Munro se souvient d’une discussion avec une amie qui a découvert que ses parents prévoyaient laisser la totalité de leur succession à son frère aîné. « Ils estimaient qu’il était le moins stable de leurs trois enfants sur le plan financier et qu’il avait donc le plus besoin d’aide », affirme-t-elle. « Elle avait été financièrement responsable toute sa vie et avait prodigué la plupart des soins à ses parents, mais elle se sentait pénalisée pour avoir fait ce qu’il fallait. »
Une fois que l’amie de Mme Munro a fait part de ses préoccupations à sa famille, ses parents ont décidé de répartir leur succession à parts égales entre leurs enfants. « Si elle avait tenu pour acquis que la répartition se ferait à parts égales, elle aurait été plutôt amère après leur décès », affirme Mme Munro. « Les parents ne veulent pas laisser leurs enfants dans une telle situation. »
Aborder les questions juridiques et financières
Lois et règlements canadiens sur la planification successorale
Au Canada, le processus de transfert de patrimoine est régi par une série de lois et de statuts qui peuvent varier d’une province ou d’un territoire à l’autre. En rédigeant un testament et un plan successoral, vous assurez le respect de vos dernières volontés.
Selon Mme Munro, il est utile d’avoir une liste détaillée de vos actifs et une bonne idée de vos objectifs lorsque vous suivez le processus de planification successorale. Si vous avez un conjoint ou conjoint de fait, il serait judicieux de discuter de votre vision commune.
Impôt successoral
Le Canada n’a pas d’impôt successoral officiel, contrairement à d’autres pays, mais vos héritiers pourraient tout de même devoir payer des impôts élevés après votre décès par le biais d’un processus appelé « disposition réputée ». En vertu des règles fiscales canadiennes, tout bien ou actif non enregistré que vous laissez en héritage est réputé avoir été cédé ou liquidé au moment de votre décès. Tout impôt sur les gains en capital découlant de la disposition réputée de ces actifs doit être payé conformément à la déclaration finale produite dans le cadre de votre succession.
La disposition réputée de l’actif du défunt à sa juste valeur marchande a lieu au moment du décès. Il convient de noter qu’il est possible de transférer des actifs non enregistrés à un conjoint survivant au prix coûtant, et ce, avec report d’impôt, mais cela ne fait que reporter le montant résultant de la disposition réputée et les impôts y afférents jusqu’au décès de ce conjoint survivant.
Un autre point à souligner concerne la récente augmentation du taux d’inclusion des gains en capital de 50 % à 66,7 % pour tout gain supérieur à 250 000 $. Ainsi, vos héritiers pourraient être confrontés à une facture d’impôt élevée. Tout gain inférieur à ce seuil demeure assujetti à un taux d’inclusion de 50 % et est imposé à votre taux marginal. Autrement dit, si vous prévoyez léguer le chalet familial et que sa valeur a augmenté de 300 000 $ depuis son achat, une partie du gain en capital pourrait être assujettie au taux d’imposition plus élevé.
Frais d’homologation
Les frais d’homologation peuvent aussi éroder votre succession. Il s’agit d’un processus judiciaire par lequel un tribunal reconnaît officiellement un testament ou, en l’absence de testament, désigne quelqu’un pour agir au nom de la personne défunte. Les frais d’homologation varient selon la province et la valeur de la succession, et le processus peut prendre plusieurs mois.
Réduction des impôts et des frais
Dons d’actifs
L’un des moyens de réduire la charge fiscale pesant sur votre succession est de faire des dons de votre vivant, afin que vous puissiez voir vos bénéficiaires en profiter. « Ils disent qu’il vaut mieux donner de la main chaude plutôt que de la main froide », affirme Mme Munro. Lorsque vous vendez un actif pour donner de l’argent à vos enfants ou à vos futurs bénéficiaires, vous manifestez cet état d’esprit. « Vous payez l’impôt aujourd’hui et le bénéficiaire ne paie pas d’impôt supplémentaire sur votre don », explique-t-elle. Elle ajoute que vous devez vous assurer d’avoir suffisamment d’argent pour vos propres besoins de retraite.
Assurance vie
La souscription d’une police d’assurance constitue un autre moyen d’aider les bénéficiaires à faire face à d’éventuels impôts ou frais élevés dont ils hériteraient en même temps que le chalet familial ou d’autres biens. Les prestations versées par une police d’assurance vie ne sont généralement pas assujetties à l’impôt sur le revenu.
Établissement d’une fiducie
Une fiducie peut vous aider à réduire votre fardeau fiscal tout en gardant un meilleur contrôle sur la cession de vos actifs à vos bénéficiaires. En règle générale, les actifs transférés à une fiducie font l’objet d’une disposition réputée, mais les actifs d’une fiducie ne sont plus assujettis à des frais d’homologation. Par conséquent, selon votre lieu de résidence et la valeur de votre succession, vous pourriez faire économiser une somme d’argent importante à vos proches. Il est important de souligner que les fiducies peuvent être compliquées et qu’elles ont leurs propres frais d’établissement et leurs propres coûts récurrents. N’oubliez donc pas de parler à conseiller en placements pour voir si elles s’avèrent un choix judicieux pour vous et vos bénéficiaires.
Vous avez le dernier mot sur la répartition de vos biens, mais la meilleure façon de satisfaire tout le monde est de communiquer vos dernières volontés à vos proches. L’aide d’un conseiller en placements, d’un comptable, d’un notaire, ou d’un avocat spécialisé en droit successoral vous permettra de vous y retrouver dans ce processus et dans la dynamique propre à votre famille. Le scénario contraire est bien pire. « Si vous n’avez pas de testament ou de bénéficiaires désignés, vous pourriez perdre le contrôle de votre succession », affirme Mme Munro. « Vous ne voulez pas suivre cette voie. »